>
1.- La conclusion
du bail à construction
2.- Le dénouement
du bail est gouverné par le principe de liberté contractuelle
2.1.-
En général, le bail prévoit que la propriété
des constructions édifiées par le preneur sera transférée
au bailleur en fin de bail
2.2.- Il peut au contraire être prévu
une cession du terrain au profit du preneur
3.- Revente
de l'immeuble par le bailleur après dénouement du bail
4.- Evaluation
des droits du bailleur et du preneur pendant le cours du bail
5.- Les risques
du bail à construction
Le bail à construction est une forme
spécifique de contrat de location
régi par les articles L. 251-1 à
L. 251-9 et R 251-1 à R 251-3 du Code de la construction et de
l'habitation ;
non soumis au statut des baux ruraux (les baux
à constructions ne bénéficient pas des avantages
fiscaux réservés aux biens ruraux loués par bail
à long terme).
Remarque : la qualification de bail implique l'existence
d'un loyer. La validité d'un loyer symbolique est parfois contestée
(R. Saint-Alary : Rép. Civ. Dalloz, Bail à construction,
n° 35). Voir cependant 1ère
civ. 19 décembre 1995, BC I, n° 481: Le
bail à construction conclu moyennant un loyer annuel de 1 franc
n'est pas dépourvu de cause dès lors que le bailleur
obtenait, en fin de bail, la propriété des constructions
réalisées, ce qui constituait une "contrepartie
sérieuse". L'administration fiscale fait preuve
d'une grande largeur de vue en précisant à la D. adm.
5 D-123, n° 8 (à jour au 10 mars 1999):
Le prix
du bail consiste :
- soit en un loyer payable en espèces et révisable
par périodes triennales ;
- soit à la fois en un loyer en espèces et dans la
remise d'immeubles ou de titres donnant vocation à la propriété
ou à la jouissance de ces immeubles ;
- soit dans la remise des constructions au bailleur, sans indemnité,
à la fin du bail.
dont la durée est comprise entre
18 et 99 ans, et confère au preneur, qui a l'obligation de construire,
un droit réel immobilier dont il profite pendant toute la durée
du bail.
Trois caractéristiques sont nécessaires
à la qualification de bail à construction :
La durée :
Elle doit être comprise entre 18 et 99 ans. A défaut,
le bail ne peut être qualifié de bail à construction.
Le TA de Dijon, 9 mars 1999, n° 98-5656 (RJF 3/99, n° 314) a jugé
que l'existence dans le bail d'une clause réservant à chacune
des parties une faculté de résiliation triennale, incompatible
avec l'exigence d'une durée minimale de 18 ans, faisait obstacle
à la qualification de bail à construction. Le même
Tribunal est allé encore plus loin en jugeant que la résiliation
au bout de 17 ans d'un bail à construction conclu pour 18 ans entraînait
sa disqualification en bail ordinaire (TA Dijon 11 juin 2002, n° 01-2415,
Coussement : RJF 1/03, n° 46). C'est d'ailleurs la position de l'administration
fiscale : D. adm. 8M-3134, n° 9, 1er décembre 1995. A noter
la position contraire de la Cour de cassation (Cass.
com. 24 juin 1997, n° 1695 P, Agnel-Teissonnière, n° 95-13038
, publié au BC IV, n° 202 et au BOI 7 E-1-98 (RJF 11/97, n°
1064).
L'obligation de construire :
Elle conditionne la qualification juridique. Un bail
qui ne prévoit qu'une faculté de construire ne peut être
qualifié de bail à construction.
Il est souhaitable que le bail à construction
décrive précisément les constructions que le preneur
s'oblige à édifier. Le TGI de Marseille a même jugé
que cette description était nécessaire à la qualification
juridique de bail à construction (TGI Marseille, 26 mars 1973 :
Ann. Loyers 1973, p. 1007) mais ce n'est pas l'avis exprimé dans
la RM JO AN 7 février 1970, p. 307).
Remarque : Sur le plan fiscal, l'administration estime
que l'édification de bâtiments non prévus au bail
initial mais convenu dans un avenant postérieur, sans modification
de la durée du bail, ne permet pas à ces bâtiments
de bénéficier du régime prévu pour les constructions
réalisées dans le cadre d'un bail à construction
(RM Sergheraert 3 juin 1991, n° 38 247, JOAN p. 2167). Le même
avis, pour des constructions non prévues au bail initial, se retrouve
sous la plume de Mme le commissaire du Gouvernement S. Boissard (sur CE
14 janvier 2004, n° 227969, Pacé : Droit Fiscal 2004, n°
28, comm. 1133). Ces positions renforcent l'utilité d'une description
suffisante, dans le bail, des bâtiments à édifier.
L'obligation de construire est complétée
par celle de maintenir les constructions en bon état jusqu'au terme
du bail.
La constitution d'un droit réel au profit
du preneur :
L'existence d'un droit réel au profit du preneur
est une condition de qualification.
Il s'ensuit que le bailleur doit avoir la capacité
d'aliéner une chose immobilière. En cas de démembrement,
le concours du nu-propriétaire est donc indispensable.
Lorsque des servitudes sont indispensables à la
construction, le bail ne peut interdire au preneur de les constituer et
elles survivent à la fin du bail. Ainsi par exemple pour des servitudes
de passage, d'appui ou de cour commune.
Le preneur peut céder le bail à un ou plusieurs
cessionnaires, ou l'apporter à une société. Il reste
garant, vis-à-vis du bailleur, jusqu'à l'achèvement
des constructions qu'il s'était engagé à édifier.
La taxe foncière est intégralement à
la charge du preneur (article 1400.II du CGI - La règle est identique
à celle du bail emphytéotique).
Le preneur peut enfin hypothéquer les droits qu'il
détient. Cette hypothèque s'éteint à l'expiration
du bail. L'article L. 251-6, 2ème alinéa prévoit
qu'en cas de résiliation amiable ou judiciaire, les privilèges
ou hypothèques nés du chef du preneur ne s'éteignent
qu'à la date primitivement convenue pour l'expiration du bail.
Cette disposition pose de sérieuses difficultés d'application
et ne semble avoir généré aucune jurisprudence.
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1.- La conclusion du bail à construction :
Dès lors que le bail à construction confère
au preneur un droit réel immobilier, il doit être publié
au fichier immobilier, ce qui implique qu'il revête la forme d'un
acte notarié.
Le bail a construction est néanmoins expressément
exonéré de la taxe de publicité foncière par
l'article 743.1° du CGI. Le salaire du conservateur des hypothèques
est exigible (au taux de 0,1 %) sur le montant cumulé du loyer
pour toute la durée du bail, augmenté de la valeur qu'auront
en fin de bail, les constructions édifiées par le preneur
sur le terrain loué lorsqu'elles doivent revenir gratuitement au
bailleur en fin de bail.
Le régime du bail à construction au regard
de la TVA a été sensiblement modifié depuis le 11
mars 2010.
Le bail à construction est, en principe, exonéré
de TVA (article 261 D.1°bis du CGI). Mais les personnes qui consentent
un bail à construction peuvent, sur leur demande, acquitter la
taxe sur la valeur ajoutée (article 260.5° du CGI). Le bailleur
peut donc opter pour la TVA .
Dans ce cas, la base d'imposition est constituée
par la valeur du droit de reprise des immeubles qui doivent revenir
au bailleur abstraction faite, le cas échéant, de l'indemnité
de reprise stipulée au profit du preneur et du montant des loyers,
lesquels sont imposés par ailleurs dans les conditions du a du
1 (article 266.5 du CGI).
La taxe est exigible lors de la conclusion du bail
à construction s'agissant de la valeur du droit de reprise visée
au 5 de l'article 266 et, lors de l'encaissement pour les loyers (article
269.2.c bis du CGI).
Si le preneur est assujetti, il peut exercer son droit à déduction
sur la taxe facturée par le bailleur.
Les constructions édifiées par le preneur assujetti doivent
faire l’objet d’une livraison à soi-même dont
la base d’imposition inclut, outre le prix de revient de la construction,
le montant des loyers afférents à la durée du bail.
Remarque : Depuis la disparition de la contribution
représentative du droit de bail, l'option pour l'imposition du
bail à construction à la TVA n'a plus guère d'intérêt,
sauf lorsqu'elle est exercée par le bailleur en vue d'opérer
la déduction de la TVA qu'il a supportée lors de l'acquisition
du terrain loué ou à raison des travaux d'aménagement
qui lui ont été facturés.
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2.- Le dénouement du bail est gouverné par le principe de
liberté contractuelle :
2.1.- En général, le bail prévoit que la propriété
des constructions édifiées par le preneur sera transférée
au bailleur en fin de bail.
C'est d'ailleurs la solution applicable à défaut
de convention contraire : Art. L. 251-2 CCH.- Les parties conviennent
de leurs droits respectifs de propriété sur les constructions
existantes et sur les constructions édifiées. A défaut
d'une telle convention, le bailleur en devient propriétaire en
fin de bail et profite des améliorations.
Et le plus souvent sans indemnité.
Le transfert de propriété se réalise
alors par voie d'accession et se trouve donc exonéré de
tout droit de mutation.
La solution est différente lorsqu'un acte est
rédigé pour mettre fin au bail, cet acte ayant pour effet
de transférer au bailleur, par anticipation par rapport à
la date initialement prévue, la propriété des constructions
édifiées par le preneur . Dans ce cas, le droit de mutation
immobilière est perçu sur le montant de l'indemnité
due par le bailleur (Cass.
com. 24 juin 1997, n° 1695 P, Agnel-Teissonnière, n° 95-13038
, publié au BC IV, n° 202 et au BOI 7 E-1-98: RJF 11/97, n°
1064; Cass.
com. 19 juin 2001, n° 98-14707: BC IV, n° 122, RJF 10/01,
n° 1330).
Les conséquences fiscales de ce dénouement
doivent être examinées du point de vue du preneur et du point
de vue du bailleur :
Situation du preneur (cas où le preneur est
une entreprise):
Le preneur qui perd la propriété de la
construction ne peut plus la faire figurer à l'actif de son bilan.
En principe, la construction devrait être intégralement amortie
puisque, par dérogation à la règle générale,
l'amortissement peut être réparti sur la durée du
bail à construction (En application des dispositions
du second alinéa de l'article 39 D, les constructions édifiées
sur un terrain pris à bail à construction peuvent être
amorties sur la durée du bail et non sur la durée normale
d'utilisation des constructions lorsque le bail prévoit que les
constructions seront transférées gratuitement au propriétaire
du terrain. Toutefois, l'administration a précisé que, dans
l'hypothèse où la durée du bail est supérieure
à la durée normale d'utilisation des biens, le preneur peut
répartir l'amortissement sur la durée d'utilisation - D.
adm. 4 D-264, n° 14, 26 novembre 1996). Pour le reste, la situation
du preneur à bail à construction ne diffère pas de
celle du constructeur ou planteur sur sol d'autrui :
Si le bailleur verse une indemnité, l'opération
s'analyse en une cession d'actif et génère une plus-value
égale à la différence entre le montant de l'indemnité
et la valeur nette comptable. Dans le cas inverse (pas d'indemnité),
la valeur résiduelle des constructions est déductible des
produits de l'exploitation, sauf acte anormal de gestion (D. adm. 4 D-264,
n° 13, 26 novembre 1996).
Situation du bailleur :
L'attrait principal du bail à construction réside
dans le régime fiscal appliqué lorsqu'en fin de bail, les
constructions édifiées par le preneur reviennent au bailleur
sans indemnité.
Le principe demeure que cet avantage constitue, pour
le bailleur, un revenu foncier imposable (article 33 ter.II du CGI).
Mais, d'une part, le texte prévoit expressément
de valoriser ce revenu au coût de revient des constructions pour
le preneur et non à la valeur réelle des constructions au
moment du transfert de propriété.
D'autre part, le même texte prévoit que
la remise des constructions ne donne lieu à aucune imposition lorsque
la durée du bail est au moins égale à 30 ans. Entre
18 et 30 ans, il est appliqué un abattement de 8 % par année
au-delà de la dix-huitième, sur le prix de revient des constructions
(art. 2 sexies de l'annexe III au CGI).
Par exemple, si un bail à construction est conclu
pour 25 ans avec retour gratuit des constructions édifiées
par le preneur, dont le coût de revient est de 200 000 euros,
le revenu imposable du bailleur subira une décote de
8 % x (25-18), soit 56 %
soit un revenu imposable de 200 000 x 44 % = 88 000 euros.
Dans ces conditions, les baux à construction
sont couramment conclus pour des durées d'au moins 30 ans. On rencontre
néanmoins des durées plus courtes. Se pose alors la question
des effets d'une prorogation conventionnelle. L'administration fiscale
a toujours refusé d'en tenir compte, sauf situations particulières
(prorogation motivée par la construction de nouveaux locaux ou
plus généralement par des raisons économiques telles
que la survenance d'aléa entraînant, par rapport au projet
de construction initialement prévu, un surcoût ou une augmentation
de consistance des constructions).
Cf. RM Foyer, n° 75989, JOAN 13
janvier 1986, p. 127 (nonobstant la prorogation, le transfert au bailleur
de la propriété des constructions édifiées
par le locataire se réaliserait au titre de l'année de
l'échéance initialement prévue).
Pour un tempérament en cas de nouveaux projets de constructions
: RM Delehedde n° 24041, JOAN 21 avril 1980, p. 1623. La réponse
précise que les constructions initialement prévues bénéficient
de la durée supplémentaire résultant de l'avenant
modificatif mais que le revenu imposable résultant de la remise
au propriétaire des constructions prévues par l'avenant
doit être déterminé en prenant en compte la durée
écoulée depuis la signature de l'avenant et non par référence
à la durée totale du bail.
Cf. également la solution donnée au Comité fiscal
MOA du 30 septembre 1998 :
"Toutefois, la prorogation d'un
bail à construction pour raisons économiques a pour
effet de différer la remise des constructions au bailleur à
l'issue de la période prorogée. Il s'ensuit que l'imposition
en fin de bail de la valeur des constructions au nom du bailleur,
prévue par l'article 33 ter du CGI, est également différée
jusqu'au terme de la période prorogée. Le point de savoir
si ce sont des raisons économiques qui sont à l'origine
de la prorogation constitue une question de fait, qui doit être
examinée au cas par cas au vu des circonstances propres à
chaque espèce.
" La seule mention au contrat de raisons économiques n'est
pas en soi suffisante si elle n'est pas corroborée par la constatation
de la réalité des raisons économiques invoquées,
qui peut résulter, par exemple, d'aléas survenus depuis
la conclusion du bail, tel un surcroît des constructions à
édifier par rapport au coût prévu lors de la conclusion
du bail ou encore de la nécessité pour l'entreprise
locataire d'édifier des constructions non prévues par
le contrat d'origine ".
La Cour administrative d'appel de Lyon a infirmé
cette doctrine : CAA
Lyon, 1er juillet 2004, n° 98-1234 :
" Considérant qu'aucune disposition
législative, et notamment pas celles précitées
de l'article L. 251-1 du code de la construction et de l'habitation,
n'empêche les parties à un bail à construction d'en
décider la prorogation ; que l'avenant décidant une telle
prorogation, qui n'a pour conséquence que de fixer le terme du
bail à une date postérieure à celle initialement
prévue, ne peut s'analyser comme un bail commercial succédant
au bail à construction qui serait expiré sauf pour l'administration
fiscale, si elle estime que tel est le véritable caractère
de l'opération et que celle-ci a eu pour but d'éluder
ou d'atténuer l'impôt, à mettre en oeuvre la procédure
de répression des abus de droit prévue à l'article
L. 64 du livre des procédures fiscales ".
Son arrêt a été confirmé
par le Conseil d'Etat: CE
25 janvier 2006, n° 271523:
Si l'article L. 251-1 du code de la construction et
de l'habitation interdit qu'un bail à construction puisse se
prolonger par tacite reconduction, cette disposition n'interdit pas
aux parties de convenir de proroger l'échéance initialement
prévue pour un tel bail ; ...une telle prorogation, qui n'implique
pas, par elle-même, la naissance d'un nouveau contrat, a pour
effet de reporter au nouveau terme convenu la date à laquelle
le bailleur devient propriétaire de l'immeuble construit par
le preneur, et par suite l'imposition du revenu foncier en nature correspondant.
Adde,
dans le même sens: CAA
Douai, 28 septembre 2004, n° 00-01270, CAA
Marseille, 29 mars 2005 n° 03-02007.
Lorsque la remise des constructions au bailleur est
imposable, l'imposition peut faire l'objet d'un étalement sur 15
ans, qui cesse en cas de cession du bien (toutefois en cas de décès,
l'étalement peut être maintenu au nom des héritiers,
s'ils en font la demande). Dans ce dernier cas (cession du bien), l'imposition
immédiate des annuités restante peut donner lieu à
l'application de la règle du quotient (article 163-0A du CGI).
La donation-partage en nue-propriété
constitue une cession mettant fin à l'étalement (CAA
Nantes, 15 mai 2001, n° 97-2577 : RJF 10/01, n° 1238).
Ces dispositions s'appliquent, que le bailleur soit un
particulier ou une entreprise.
Retour au plan
2.2.- Il peut au contraire être prévu une cession du terrain
au profit du preneur.
Cette convention permet au bailleur de retarder la date
de réalisation de la plus-value, et le plus souvent (s'il s'agit
d'un particulier), compte tenu de la durée du bail à construction,
d'échapper à toute imposition.
Cf. D. adm. 8 M-252, 1er décembre 1995 :
A. BAIL À
CONSTRUCTION CONCLU POSTÉRIEUREMENT AU 31 DÉCEMBRE 1976
I. Détermination
de la plus-value
2. Le montant
de la plus-value nette est déterminé au moment de la signature
du bail, d'après la valeur du bien à cette date, conformément
aux articles 150 J à 150 R du CGI (CGI, art. 151 quater, al.
2).
Quelle que soit donc la nature juridique de la clause (Vente sous condition
suspensive, sous condition résolutoire ou promesse unilatérale
de vente) selon laquelle le locataire ne devient propriétaire
du terrain à l'expiration du bail qu'à la condition d'avoir
acquitté le prix, la plus-value de cession est toujours déterminée
à la date de signature du bail, en fonction de la valeur du terrain
et de l'érosion monétaire à cette date.
La valeur à retenir est celle qui est fixée dans l'acte.
À défaut, elle doit être réputée égale
au montant cumulé des suppléments de loyers de toute la
durée du bail et de la valeur de reprise des constructions en
fin de bail.
Cette plus-value est donc déterminée (plus-value à
court terme ou plus-value à long terme) dans les conditions de
droit commun exposées supra 8 M 22, selon la durée écoulée
entre la date d'acquisition du terrain et la date de signature du bail.
Elle donne lieu, bien entendu, au même titre que les autres plus-values,
à l'abattement à la base de 6 000 F.
Remarque importante. - Le texte légal prévoit que la durée
de possession prise en compte pour l'établissement de la plus-value
est la période comprise entre la date d'acquisition du bien par
le bailleur et la date de transfert de propriété en fin
de bail. Il y a donc lieu de faire abstraction de la date de signature
du contrat de bail qui est prise en compte pour la détermination
de la plus-value.
3. La plus-value imposable, déterminée dans ces conditions,
ne doit être effectivement soumise à l'impôt sur
le revenu qu'au titre de l'année de l'expiration du bail, c'est-à-dire
de l'année du transfert de propriété. Elle est
taxée au nom de la personne qui, à cette date, a la propriété
du terrain.
II. Taxation
de la plus-value
4. À
l'expiration du bail, la plus-value éventuellement imposable,
déterminée à la date de signature du contrat de
bail, doit être révisée en fonction de la même
clause d'indexation que le loyer lui-même.
C'est la plus-value ainsi révisée en fin de bail qui sera
effectivement soumise à l'impôt à cette date.
Retour au plan
3.- Revente de l'immeuble par le bailleur après dénouement
du bail:
L'administration fiscale a longtemps considéré
que l'immeuble dont le bailleur était devenu propriétaire
par accession, sans indemnité, était entré dans son
patrimoine pour une valeur nulle. La plus-value de cession (abstraction
faite du terrain), était alors égale au prix de cession
diminuée de l'abattement pour durée de détention.
De même, si le bailleur était une entreprise, le bâtiment
devait être inscrit à l'actif pour zéro.
Cette doctrine a été abandonnée
dans une instruction du 3 juillet
2001 (BOI 8 M-1-01) : Lorsque la remise des constructions au bailleur,
sans indemnité, est la contrepartie de la modération du
loyer versé pendant toute la durée du bail, il est désormais
admis que la valeur d'acquisition à retrancher du prix de cession
pour le calcul de la plus-value, soit le prix de revient des constructions.
Le Conseil d'Etat a, peu après, confirmé que la valeur d'acquisition
à retenir était égale à la valeur de l'avantage
consenti au preneur sous la forme d'une modération du loyer, en
contrepartie de la remise des constructions sans indemnités (CE
3 juillet 2002, n° 1970724, Geoffroy : RJF 10/02, n° 1109).
La CAA de Lyon estime, en l'absence de tout autre élément
d'appréciation, que cet avantage peut être évalué
au prix de revient du bâtiment, sans application de la décote
prévue pour l'imposition au titre des revenus fonciers lorsque
le bail a duré plus de 18 ans (CAA
Lyon 15 mai 2003, n° 99-990).
Exemple : Un bail à construction est conclu
le 1er janvier 1970, pour une durée de 30 ans, les constructions
édifiées par le preneur devant revenir gratuitement au
bailleur en fin de bail. Le loyer a été fixé à
un niveau modéré pour tenir compte de cet avantage. Les
constructions édifiées par le preneur ont un prix de revient
de 200 000 euros.
Le bailleur (un particulier) est devenu propriétaire
des constructions le 1er janvier 2000, lors de l'expiration du bail.
Il revend l'immeuble le 1er février 2004 :
La plus-value réalisée se décompose
:
- elle est exonérée en ce qui concerne le terrain, détenu
depuis plus de 15 ans ;
- elle est imposable en ce qui concerne la construction, qui n'est détenue
que depuis 4 ans, sans décote.
Nota : Le prix de cession de l'immeuble doit être
ventilé dans l'acte de vente entre la fraction se rapportant
au terrain et celle se rapportant aux constructions, conformément
aux dispositions de l'article 74 C de l'annexe II au CGI (Instruction
8 M-1-01 du 3 juillet 2001).
Par hypothèse, l'immeuble est vendu 450
000 euros, dont 100 000 euros représentent le prix du terrain.
La plus-value imposable à raison de la construction est donc
de :
350 000 - 200 000 = 150 000 euros.
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4.- Evaluation des droits du bailleur et du preneur pendant le cours du
bail :
La valeur des droits respectifs du bailleur et du preneur
doit normalement tenir compte des perspectives de dénouement du
bail à construction. Si, au terme du bail, les constructions édifiées
par le preneur doivent revenir au bailleur sans indemnité, il est
logique de considérer que la valeur des droits du bailleur augmente
au fur et à mesure qu'on s'approche de la fin du bail, tandis que
la valeur des droits du preneur s'amoindrit.
Ce raisonnement, bien que non énoncé dans
la documentation de base de l'administration fiscale, figure dans le Guide
de l'Evaluation publié par la DGI en 1989, page 93 :
" Construction édifiée par un
locataire avec clause d'accession au profit du propriétaire en
fin de bail :
" En cours de bail, au fur et à mesure que l'on se rapproche
de l'échéance du contrat, les constructions perdent de
leur valeur dans le patrimoine du locataire et apportent une plus-value
croissante au terrain d'assiette appartenant au bailleur. S'agissant
de ce dernier, l'évaluation portera donc sur un terrain immobilisé
mais valorisé par l'approche de la réalisation de la clause
d'accession concernant les constructions, ces mêmes constructions
n'ayant qu'une valeur résiduelle décroissante dans le
patrimoine du locataire constructeur ".
Dans un dossier de presse du 28 avril 1983, le ministère
du Budget avait même précisé que " la proportion
de la valeur des constructions que le bailleur doit chaque année
incorporer à son patrimoine comme représentative de son
droit à la pleine propriété des biens en fin de bail
est égale au pourcentage de l'amortissement des constructions calculé
par le preneur ".
Cette conception " arithmétique " de
l'évaluation est sans doute discutable lorsque la durée
du bail est supérieure à la durée d'amortissement.
Toutefois, son application stricte conduit à neutraliser toute
plus-value dans le patrimoine du constructeur puisque à tout moment
la valeur de ses constructions est égale à leur valeur nette
comptable.
La circonstance que le preneur soit propriétaire
de la construction pendant la durée du bail ne permet cependant
pas de considérer que la valeur de son droit réel correspond
à la valeur des constructions (3ème
civ. 17 juillet 1997, n° 95-70038 : BC III, n° 169).
On perçoit également l'avantage qu'il peut
y avoir à transmettre le terrain loué par bail à
construction dans les premières années du bail, ce qui permet
de retenir une évaluation proche de la valeur d'un terrain nu grevé
d'un bail. L'existence d'un droit réel constitué au profit
du preneur confère à ce dernier une autonomie supérieure
à celle qui serait la sienne s'il était preneur à
bail rural.
RM
Le Fur, n° 60573 (JOAN Q 31 août 2010, p. 9489):
En application de l'article 885 E du CGI, l'assiette
de l'ISF est constituée par la valeur nette, au 1er janvier de
l'année d'imposition, de l'ensemble des biens, droits et valeurs
imposables appartenant au foyer fiscal. Par exception à ce principe,
l'article 885 G du même code prévoit que les biens ou droits
grevés d'un usufruit, d'un droit d'habitation ou d'un droit d'usage
accordé à titre personnel, sont compris dans le patrimoine
de l'usufruitier ou du titulaire du droit pour leur valeur en pleine
propriété. Ces dernières dispositions ne visent
pas les propriétaires de biens donnés à bail emphytéotique,
qui restent donc soumis à l'ISF du chef des biens concernés.
Cela étant, pour la liquidation de l'ISF, et
conformément aux dispositions des articles 761 et 885 S du CGI,
les biens immobiliers doivent être évalués à
leur valeur vénale réelle au 1er janvier de l'année
d'imposition. La valeur vénale des immeubles, dont le propriétaire
a l'usage, est réputée égale à la valeur
libre de toute occupation. Lorsque les biens dont il est propriétaire
sont donnés en location, il est admis que la valeur vénale
reflète cet état par l'application d'une décote,
dont le montant varie notamment en fonction de la nature juridique et
de la durée du bail restant à courir. Ainsi, s'agissant
des biens loués dans le cadre d'un bail emphytéotique,
il est admis que le redevable puisse procéder à une décote
dont l'importance sera fonction des contraintes propres au bail, telles
que la durée qui reste à courir (dégressivité
de la décote), le montant des loyers ou l'existence de constructions
mises à la charge du preneur et qui seront la propriété
du bailleur à l'issue du bail.
Retour au plan
5.- Les risques du bail à construction :
La résiliation anticipée :
Elle peut priver les parties de l'avantage fiscal attendu,
notamment si elle intervient avant la 30ème année du bail.
La destruction des bâtiments :
Cas du bâtiment détruit par incendie, l'indemnité
d'assurance profitant au propriétaire du terrain :
CE
21 mars 2003, n° 235874 : RJF 6/03, n° 714 :
Une société immobilière conclut
un bail à construction au profit d'une société
anonyme pour une durée de 20 ans à compter du 1er juillet
1973. Le bail impose à la société locataire de
souscrire pour les bâtiments à construire, une police d'assurances
incendie destinée à permettre la reconstruction à
l'identique. Le bail stipule enfin qu'en cas de destruction de la construction
par cas fortuit, le preneur ne serait pas obligé de reconstruire
et le bail pourrait être résilié, l'indemnité
d'assurance devant alors être versée au bailleur.
Les bâtiments ayant été détruits par incendie
en octobre 1990, le bail fut résilié au 1er septembre
1991 après versement à la société immobilière
bailleresse de l'indemnité d'assurance représentant le
coût de la reconstruction.
Il a été jugé que cette indemnité d'assurances
perçue par le bailleur en compensation de la perte de revenu
subie du fait de la destruction des constructions avait le caractère
d'un revenu foncier, bien qu'elle fût supérieure au revenu
qui eût été imposable en l'absence de sinistre.
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